
Comment Volkswagen peut redorer son blason en s’inspirant de Toyota
Après les révélations sur le trucage des tests antipollution de ses véhicules, Volkswagen cherche maintenant à redresser son image corporate. La marque automobile allemande doit avant tout regagner la confiance de ses alliés, comme avait dû le faire Toyota, entre 2009-2010, alors secoué par un scandale.
Jusque-là, la communication de crise de Volkswagen a suivi le manuel, sans inventivité, mais sans faux pas. La réactivité a été moyenne : le monde a appris vendredi 18 septembre que le constructeur avait installé un logiciel espion sur 500.000 de ses véhicules diesel aux États-Unis afin de leur permettre de passer les sévères tests d’émissions américains. Mais il a fallu attendre dimanche pour que la société mette en ligne une déclaration écrite de son PDG Martin Winterkorn reconnaissant les faits.
La transparence a été un peu contrainte quand, mardi, le PDG a dû annoncer que le nombre de véhicules défectueux n’était pas de 500.000, mais de 11 millions dans le monde, car la fraude n’est pas limitée aux États-Unis et s’étendait au monde entier. Quant à l’action corrective, il a fallu attendre mercredi pour que le PDG contrit annonce sa démission reconnaissant que « Volkswagen avait besoin d’un nouveau départ, et ce également en termes de personnel ».
Une image explosée en plein vol
Maintenant arrive le vrai obstacle : comment reconstruire une image de marque qui a explosé en plein vol ? Pendant des années, Volkswagen a en effet axé sa communication sur les sujets de développement durable et de protection de l’environnement, via ses campagnes Think Blue ou Clean Diesel (qui n’est plus en ligne évidemment).
C’est l’effondrement de ce positionnement et de son image corporate qui va coûter cher, très cher. JP Morgan a déjà estimé la dépense potentielle à 40 milliards de dollars – bien au-delà de l’estimation d’une amende initiale de 18 milliards –, car elle augmentera au fil d’actions judiciaires multiples dans tous les pays où le groupe est présent. Et quand Fitch a prévenu cette semaine qu’il plaçait la note du groupe sous surveillance négative, il a indiqué que cela reflétait l’atteinte à la réputation des marques.
Le modèle japonais
Pour trouver la voie de sortie, Mathias Müller, gagnerait à lire (ou relire ?) l’excellent ouvrage de Jeffrey Liker et Timothy Ogden « Toyota, un modèle de gestion de crise ». En 2009, un couple d’américain et leur fille trouvaient la mort dans un grave accident au volant d’une Lexus. Toyota entrait dans une longue et douloureuse tourmente. En 2010, le groupe a procédé à trois campagnes de rappels portant sur plus de 8 millions de véhicules dotés de pédales d’accélérateur potentiellement défectueuses…
Comme dans l’affaire Volkswagen, la crise Toyota a pulvérisé d’un coup la crédibilité et le positionnement publicitaire et médiatique du groupe, axé sur une qualité sans faille. Fortement soupçonné d’avoir été au courant du problème dès 2007, Toyota n’avait pas très bien géré son début de crise en 2009. Tokyo a mis trois mois à réaliser l’ampleur du problème américain et si le PDG héritier du fondateur, Akio Toyoda, a présenté ses excuses publiques, il n’a pas démissionné.
Toyota est sortie de la crise en s’appuyant sur l’engagement sans faille de ses parties prenantes internes. Tout d’abord sur la fierté et le professionnalisme de ses concessionnaires qui ont tout fait pour que les rappels se déroulent vite et bien. Ensuite sur une solidarité réciproque avec ses salariés : le management a évité de déstabiliser l’interne en traquant les boucs émissaires ou de recourir à des licenciements, mais a redoublé d’effort pour faire appliquer le fameux kaizen, cette méthode de perfectionnement permanente qui consiste à identifier les causes profondes et à y remédier au lieu de s’attaquer uniquement aux symptômes. Aujourd’hui, le groupe, qui venait de se faire doubler en termes de ventes par Volskwagen sur le marché mondial, triomphe sans doute…
Rassurer la famille
Comme sa concurrente japonaise, la firme allemande devra tabler sur le fait que la famille pardonne toujours plus vite les fautes que l’extérieur. Les salariés de Wolfsburg se montrent déjà prêts à le faire. Et Ansgar Klein, président de la fédération allemande des concessionnaires indépendants, souligne que «la plupart des automobilistes se préoccupent plus de la consommation que des émissions. Le scandale n’altère pas la confiance envers les voitures VW, même si la confiance envers la société a souffert ».
Conserver ou regagner la confiance de ses alliés naturels sera le seul moyen de rétablir la réputation qui était celle du constructeur jusqu’au 20 septembre dernier, et sera plus efficace qu’une vaste campagne de communication. Car tout ce qui sera émis par la firme de Wolfsburg en matière de communication externe, médiatique ou publicitaire, sera sujet à caution pendant encore longtemps. Peut-être même jusqu’aux 80 ans de la société en 2017.