
La lutte contre le terrorisme instrument du recentrage de la communication de François Hollande
L’annonce par François Hollande lui-même, à Marseille le 15 juillet 2015 de l’arrestation de trois suspects Marseille, soupçonnés de vouloir commettre des actes terroristes en France marque un tournant dans sa communication.
« Je veux vous dire que cette semaine, nous avons prévenu des actes terroristes qui auraient pu être produits. Le ministre de l’Intérieur fera une communication demain ». Pour la première fois, le Président François Hollande communique sur une enquête en cours et non plus seulement sur le danger terroriste.
Officiellement, le Président ne fait que donner une information devant un parterre de journalistes. Par commodité de langage, les médias relaient sa prise de parole en évoquant une simple « communication ». Mais en réalité, il s’agit bien là d’un acte politique, dont la maîtrise – bien loin du caractère spontané qu’on lui prête – vient souligner un résultat positif en matière de prévention des actes de terrorisme en France. L’enjeu est politique, car hautement symbolique !
François Hollande va donc s’inscrire dans un nouveau registre de communication. L’arrestation des trois suspects est la première occasion médiatique qu’il ne faut pas laisser passer. La maîtrise de la communication présidentielle impose donc à François Hollande de prendre la parole le premier, quitte à prendre de court Beauvau et les forces de l’ordre. D’autant plus que le timing politique lui est favorable : adoption récente par le Parlement du projet de loi sur le renseignement et vote, le même jour au sein de l’UE, sur la directive permettant l’échange transnational de données des passagers aériens.
Conscient de l’écho médiatique que prendra l’annonce de l’arrestation des suspects, le Président inscrit sa communication dans la foulée de son interview du 14 juillet, où il a longuement mis l’accent sur l’international et la menace terroriste. Il s’agissait là de communiquer sur le rôle traditionnel du chef de l’Etat comme garant de la sécurité des Français. Mais à Marseille, le Président adopte une posture plus marquée dans le volontarisme (« Je veux vous dire ») et la répartition des rôles au sein de l’Exécutif (« Le ministre de l’Intérieur fera une communication demain »).
La primauté de l’annonce et le changement de registre employé – à mi-chemin entre la communication de crise et la médiation – témoignent d’une redéfinition de la communication de l’Elysée. Celle-ci ne veut plus seulement s’inscrire en réaction aux évènements, mais dans l’action et à l’initiative d’opérations. L’Elysée n’a donc pas hésité à communiquer sur ce premier résultat et à précipiter la « communication » du ministre de l’Intérieur sur les aspects techniques, malgré l’opération policière et judiciaire toujours en cours, ce que l’opposition n’a pas manqué de qualifier de « récupération politique ».
Si le Président assure ne pas être en campagne pour un second mandat, on ne peut qu’observer une évolution dans sa communication. A moins de deux ans de l’élection présidentielle, la communication présidentielle opère un recentrage de la parole présidentielle sur des séquences médiatiques isolées mais importantes. Tout en jouant la carte de la transparence, le Président tend à communiquer « à chaud » et « spontanément », tout en s’assurant de faire le lien entre le gouvernement, les forces de l’ordre, de renseignement.
L’opinion publique est la cible de cette stratégie de synthèse et de recentrage. Le Président souhaite apparaître comme actif et impliqué, communiquant sur des résultats et non plus seulement annonciateur ou dénonciateur des dangers qui menacent les Français. S’il est vrai que le Président a compris depuis longtemps les enjeux d’une communication maîtrisée en lien avec l’actualité, son utilisation en amont d’évènements (et non plus en réaction à l’actualité) est inédite et n’est sans doute que la première d’une longue série « d’ annonces ».
Vidéo de la prise de parole de François Hollande, le mercredi 15 juillet à Marseille : http://video.lefigaro.fr/figaro/video/roubaix-la-mairie-envisage-de-vendre-des-maisons-a-1-euro/4359589887001/