
Le choc ou le sens des mots.
Depuis que son avocat a reconnu en début de semaine l’existence des enregistrements réalisés par Patrick Buisson lors de réunions tenues sous la présidence de Nicolas Sarkozy, tous les médias, à l’unisson, ne parlent que de l’affaire des « écoutes » de l’Elysée. Et l’utilisation du mot » écoute » s’est imposée comme une évidence pour tous.
Mais le fait d’enregistrer des extraits de conversations tenues lors d’une réunion à laquelle on assiste, même à l’insu des autres participants, n’a rien à voir avec la pratique des écoutes secrètes. L’écoute secrète au sens ordinaire et criminel du terme correspond à la volonté de suivre une conversation à laquelle on ne participe pas. Elle implique nécessairement l’idée d’une captation à distance, par un tiers. En 1973, les célèbres plombiers du journal satirique Le Canard Enchaîné ont été surpris en train de tenter d’installer des micros dans le bureau de la direction du Canard pour écouter de l’extérieur les discussions qui s’y tenaient. Ils n’assistaient pas physiquement aux conférences de rédaction. Et les exemples similaires sont légion.
Le fait que Patrick Buisson ait enregistré des extraits de conversations lors de réunions auxquelles il assistait relève de ses relations personnelles et professionnelles tant avec Nicolas Sarkozy qu’avec les autres participants à ces réunions. Il s’agit plutôt d’une banale et privée affaire de confiance entre l’ancien Président et son conseiller que d’un scandale politique. Le premier doit en tirer les conséquences, mais il est clairement sans fondement d’en faire une affaire politique et de persister dans ce que les médias voudraient nous faire croire.
Sauf si ces nouveaux enregistrements font état de faits ou de comportements contraires à la loi ou à la morale, mais à ce jour ce n’est pas le cas. Richard Nixon a été contraint de démissionner en août 1974, non pas parce qu’il avait enregistré des conversations tenues entre lui et ses plus proches conseillers à leur insu, mais en raison de ce que ces enregistrements ont révélé sur son implication dans l’affaire du Watergate, ses tentatives de dissimulation et plus globalement sa manière d’être.
Le choc des mots ne doit pas induire en erreur sur leur sens, ni nous le faire oublier.