
L’affaire du Médiator : un cas exemplaire dans l’histoire de la communication
Au delà de ses conséquences en matière de santé publique et de gouvernance du secteur, l’affaire du Médiator restera comme un cas exemplaire dans l’histoire de la communication.
Dans un premier temps, au printemps, le laboratoire a employé la stratégie du silence et de l’étouffement qui lui avait si bien réussi jusqu’alors et s’est employé à essayer de faire interdire le livre qui l’accusait En vain, et il a par la-même largement contribué à faire connaître son existence.
Dans un deuxième temps, en novembre, alors que la polémique s’amplifiait et le nombre des victimes supposées augmentait, le fondateur s’est lancé dans une stratégie du déni. Dans une interview au Monde, d’autant plus remarquée que c’était presqu’une grande première, Il n’a pas hésité à qualifier le scandale « d’opération marketing » avant conclure que l’idée d’une collusion entre l’administration et son entreprise le faisait « sourire ». Déni dont témoigne à nouveau, malgré l’embauche fortement médiatisée d’une agence de communication réputée, le discours de vœux prononcé devant les salariés début janvier. La polémique repart de plus belle et le gouvernement donne de la voix.
L’indignation générale conduit alors le laboratoire à essayer une troisième stratégie, celle de l’ouverture et du dialogue, qui se traduit par la nomination d’une porte parole, Directrice Générale, en charge des relations extérieures. Trop tard. Si, avec son accent anglais, sa casquette d’ancienne chercheuse au CNRS et un discours sensiblement différent, cette porte parole a contribué à apaiser provisoirement une situation tendue à l’extrême au prix d’une volte face médiatique remarquée et fortement commentée. Sans pour autant convaincre. D’autant qu’un rapport de l’inspection générale des affaires sociales est venu une semaine plus tard à nouveau accabler les pratiques du laboratoire dont le fondateur a par ailleurs été cité à comparaitre devant le tribunal de Nanterre.
Jacques Servier se retrouve seul contre tous, le syndicat des labos ayant fini par l’exclure de son comité de Direction en raison notamment de sa communication déplorable « posant un risque d’image pour toute la profession ».
Une fois de plus l’expérience montre qu’en matière de communication de crise, rien n’est pire que les changements de pieds stratégiques et les vérités successives. L’affaire est ce qu’elle est, le scandale est d’une gravité indiscutable mais son intensité médiatique aurait été surement atténuée si le labo avait pris les devants et joué la transparence dés les premiers coups de semonce.
En tout état de cause, l’industrie pharmaceutique sortira certainement affaiblie de cette affaire, avec une défiance grandissante des français à l’égard de ses médicaments comme de sa gouvernance et de ses pratiques d’influence.